École

Inès Kebbab, étudiante : « J’ai envie de m’engager pour que les filles soient plus nombreuses en école d’ingénieurs »

Pour Inès Kebbab, élève ingénieure en deuxième année à Centrale Méditerranée, l’engagement est une évidence depuis des années. Aujourd’hui, en tant que responsable du pôle Fémin’ISF (Ingénieurs Sans Frontières), elle concentre son énergie à la sensibilisation et à l’action pour l’égalité femmes-hommes. Une lutte qui n’est pas sans questionnement sur les biais de genre qui sont présents dans toute notre société et qui modèlent, en partie, certaines trajectoires.
Portrait d'Inès (série 8 mars 2023)

Quel a été votre parcours avant Centrale ? Pourquoi avoir choisi d’intégrer une école d’ingénieur ?

J’ai toujours beaucoup aimé les sciences… Tout comme les autres matières ! Comme je n’avais pas une idée précise de ce que je voulais faire, j’ai intégré une classe prépa physique-chimie à Valenciennes dans le Nord sur les conseils d’une de mes enseignantes de terminale. Quand j’ai passé les concours, même après trois ans de prépa, je ne savais toujours pas ce que je voulais faire, si ce n’est que j’aimais bien la chimie et que les écoles d’ingénieur me permettraient de garder une certaine pluridisciplinarité.


D’où vient votre intérêt pour les sciences ? Pour l’ingénierie ?

Depuis mon enfance, je n’ai pas été bridée, j’ai pu m’intéresser à toutes les matières sans a priori. Quand j’étais petite, je voulais être doctorante, je ne savais pas vraiment ce que ça voulait dire, mais j’avais cette idée-là de faire de longues études scientifiques. Bien sûr, je ne savais pas ce que cela impliquait.

Je n’avais pas de modèle d’ingénieur dans ma famille. Ce n’était pas dans mon milieu. Et même en entrant dans une école d’ingénieur juste après ma prépa, ce métier, ce domaine restait très flou. Ce que je voulais c’était toucher à tout, m’intéresser à plusieurs domaines et me rendre utile. Intégrer une école d’ingénieur était finalement la meilleure voie.  


Pourquoi Centrale Méditerranée ?

À Centrale Méditerranée, l’aspect généraliste me plaisait, tout en me permettant de garder la facette chimie. La localisation comptait aussi. C’était un défi personnel, en ayant vécu de ma naissance jusqu’à mes vingt ans à Valenciennes, je voulais voir si je pouvais me débrouiller à l’autre bout de la France.


Dans les filières scientifiques, les filles sont moins nombreuses, cela a pu vous poser problème ?  

Au lycée, j’étais dans des classes assez équilibrées. En prépa, c’est vrai que nous étions peu nombreuses. Cependant, les filles occupaient les premières places du classement de la classe. Ainsi, je ne me sentais pas moins légitime.

J’avais conscience d’être dans un milieu plus masculin. Mais, parmi nos profs, il y avait des enseignantes qui avaient des parcours prestigieux, qui étaient passionnées et passionnantes. Je sentais que le fait d’être une fille n’était pas un frein. J’ai eu beaucoup de chance, car je n’avais pas l’impression d’avoir plus à prouver que mes camarades masculins.

Ensuite, en école d’ingénieur, je n’avais pas particulièrement d’inquiétudes sur le fait qu’il y ait peu de filles, mais j’ai envie de m’engager pour qu’on soit plus nombreuses à l’avenir. Quand je suis arrivée, je me suis dit, je suis une élève point barre, pas une fille en école d’ingénieur.

Après, c’est vrai que ça m’embête un peu d’avoir cette étiquette de fille qui aime la chimie. C’est très souvent le cas dans les filières scientifiques. J’adore aussi l’informatique. Souvent on oppose les deux, avec l’image du garçon qui reste enfermé derrière son ordinateur à coder... Il est temps de faire bouger toutes ces représentations complètement absurdes !


Vous êtes très engagée dans le tissu associatif de Centrale Méditerranée, pourquoi ?

Ce n’est pas une volonté récente : au collège et lycée, j’étais déléguée, j’ai aussi siégé au Conseil d’Administration et au Conseil des jeunes de la métropole de Valenciennes, tout en faisant du bénévolat. En arrivant à Centrale, je me suis engagée dans de nombreuses associations comme Échanges Phocéens, Cheer Up!, le GInfo (association informatique) ou Ingénieurs Sans Frontières (ISF) en tant que responsable du pôle Fémin’ISF. Le rôle de ce dernier engagement est de sensibiliser un public majoritairement masculin au féminisme et lutter à notre échelle pour l’égalité femmes-hommes.

Ma vie associative me prend du temps, mais je me dis que je suis jeune, j’ai de l’énergie autant en profiter, après ça sera trop tard. Et en même temps, ça me frustre d’avoir cette étiquette de « femme engagée » : les personnes qui prennent à bras le corps ces questions d’égalité sociale, de dons aux autres sont très souvent des femmes et j’ai l’impression de conforter ce cliché. Ça devrait être bien moins genré, ce n’est pas qu’une affaire de femmes !  Quand j’étais à Cheer Up! (une association qui se mobilise pour la lutte contre le cancer), nous étions principalement des filles tout comme à Échanges Phocéens (une association de mentorat entre Centraliens et collégiens/lycéens en REP+). Aussi, trop peu de filles osent encore devenir présidentes d’asso… alors on peut se demander comment s’imposer une fois dans le monde du travail ?


Vous êtes en deuxième année, qu’envisagez-vous de faire l’année prochaine ? Et ensuite ?

J’envisage de faire une césure. J’aimerais mesurer l’impact que je peux avoir dans le milieu du travail si je m’engage dans le domaine de la RSE. En fonction de mon expérience, je me tournerai ou non vers une spécialisation dans l’environnement. Sinon, j’aimerais revenir à la chimie et à l’informatique pour faire du biomédical.

Mais là aussi, je ne peux pas m’empêcher de me dire « est-ce que c’est parce que je suis une fille que je veux aider les autres dans le biomédical et dans l’environnement ? »…

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