École

5 questions à Céline Feugier, Présidente du Conseil d’Administration

Céline Feugier, ingénieure de formation et Directrice “Green Energy Technologies & Partnership” chez Alstom, est la nouvelle présidente du conseil d'administration de Centrale Méditerranée.

Dans cet article portrait, elle nous partage sa vision de l’avenir et particulièrement le rôle protéiforme de l’ingénieur de demain.

À travers son parcours et ses expériences internationales, elle met en lumière l'importance de l'innovation technologique, de l'éducation et de l'engagement pour répondre aux défis actuels et futurs. Nous avons aussi échangé sur son ambition pour l’Ecole , dans le cadre de son mandat.
Portrait de Céline Feugier

Céline Feugier, avant tout, pouvez-vous vous présenter ?

Bien entendu. Je suis varoise de naissance. J'ai intégré le monde des écoles d'ingénieurs par la voie universitaire en obtenant d’abord un master en sciences physiques à l’Université Nice Sophia-Antipolis en 1996 puis un diplôme d’ingénieur généraliste chez Supélec en 1998.

D’ailleurs, je crois fermement en l'importance d'avoir des profils hybrides, venant de divers horizons, au sein de l’enseignement supérieur. C’est ce qui contribue à la richesse des promotions.

Je suis passionnée par mon métier. Cela fait 25 ans que je m’épanouis dans l'industrie. J'ai commencé par des projets d'ingénierie réseau, comme le raccordement en électricité de l’Inde du Sud, offrant ainsi l’accès à l’énergie à des populations entières.

Majoritairement, ma carrière s’est répartie entre le secteur de l'énergie et du transport, notamment chez Alstom. Mon entrée au Conseil d’Administration de Centrale Méditerranée en 2020 a été motivée par l'envie d'apporter une vision industrielle, en questionnant ce qui me semble être les bons axes technologiques et de progrès sur lesquelles la jeune génération doit s’investir.

Comment imaginez-vous les innovations futures dans un monde aux ressources limitées ? Quel est le rôle selon vous, de la technologie ?

Nous avons toutes et tous un rôle à jouer dans la transition énergétique. La technologie est un outil essentiel pour introduire de nouvelles alternatives et de nouvelles logiques individuelles et collectives.

Par exemple, chez Alstom, nous croyons beaucoup en l'intermodalité des transports urbains, combinant mobilité active et transports en commun. Mon objectif est de permettre aux gens de prendre des trains zéro émission pour les longues distances.

Cependant, il faut être réaliste : traverser un océan en train n'est pas envisageable. Nous devons aussi être mesuré dans les choix de consommation que nous faisons, ce que l’on s’autorise individuellement et dans les décisions que l'on prend. La technologie facilitera la transition et pourra permettre aussi de revisiter certains modes de consommation.

D’autre part, il me semble crucial de positionner correctement la transition énergétique pour les industries, en donnant aux industries le temps nécessaire pour cette transition, sans sacrifier les millions d'emplois en jeu.

Les décisions politiques, comme l'interdiction des moteurs diesel d'ici 2035 au niveau européen, sont nécessaires. Cependant, elles doivent être accompagnées par des alternatives accessibles et anticipées, y compris pour permettre à la population de s'adapter sans trop de conséquences sur leur niveau de vie.

C'est justement aux ingénieurs de travailler sur ces alternatives et leur passage à l’échelle. Personne ne le fera à notre place. C’est avec cette nouvelle génération que nous devons construire demain.

D’ailleurs, je tiens à dire que je suis très admirative de nos jeunes qui vivent, avec une quantité d'information gigantesque, dans une tension géopolitique permanente et qui sont là malgré tout, prêts à repenser le monde, dans toute sa complexité.
 

© Crédits photographiques : Alstom

Quels conseils concrets et activables donneriez-vous aux ingénieurs de demain qui souhaitent avoir un impact positif sur la biodiversité et la protection de la planète ?

Dans un monde saturé d’informations, il faut prendre du recul. Faire le tri entre les sources fiables et les fakes news. Tenter de sortir de sa bulle cognitive, où les algorithmes nous confortent dans nos opinions devient de plus en plus difficile. Les nouvelles générations ont une capacité impressionnante à absorber l'information, mais il est crucial pour elles de parvenir à garder un œil critique.

Il est également important de bien poser les problèmes, en les examinant sous divers angles :

  • Environnemental ;
  • économique ;
  • juridique ;
  • géographique
  • ou encore socio-culturel.

Cette approche, multifacettes et systémique, permet d’apporter des solutions adaptées après avoir correctement défini les enjeux.

Typiquement quand vous travaillez avec des pays comme l'Inde et que vous comprenez qu'en fait leur lecture temporelle est circulaire et non pas linéaire comme nous, cela vous permet de remettre en perspective le projet, appuyer sur “pause” et se poser les bonnes questions de cadrage.

Que représentent l’éducation et par extension Centrale Méditerranée pour vous ?

L'éducation est la clé d'une société en bonne santé. Tous les pays qui atteignent un niveau de vie élevé ont misé sur l'éducation. La réforme du bac, qui a affecté l'accès aux mathématiques, notamment pour les filles, est un exemple des ajustements nécessaires. Il est essentiel de continuer à financer l'éducation et de valoriser ce secteur en démontrant aux enseignants de la reconnaissance.

Ces derniers jouent un rôle fondamental en développant chez les élèves, dès l’école primaire, l'esprit critique et analytique, on en parlait à l’instant. Mais encore la capacité à raisonner, à faire preuve de logique. Quelqu’un qui prend les bonnes décisions est quelqu’un qui est bien éduqué.

Je trouve (notamment) cela très pertinent que le cursus pédagogique de Centrale Méditerranée ait généralisé le format de l’alternance. À mon époque, l'apprentissage était surtout pour les bacs professionnels et les BTS, pas du tout en ingénierie. Centrale Méditerranée a été précurseur dans cette vision de l’apprentissage.

Je suis aussi convaincue que les échanges internationaux obligatoires sont une chance inestimable pour les élèves centraliens, tant pour les partenariats qui permettent de partir que de venir. En effet, la diversité culturelle de la mobilité entrante, enrichit également l’expérience étudiante de tous à Marseille et à Nice. Travailler avec des jeunes originaires de pays étrangers nourrit la réflexion et permet de mettre en perspective notre vision du monde et des autres. Plus tard, ces ingénieurs sauront évoluer main dans la main avec des équipes cosmopolites.

Cela tombe bien, car les entreprises savent que les futurs recrutements se feront en partie à l’étranger. Nous avons une grande proportion d’ingénieurs en Inde, un pays avec un excellent niveau d’éducation et de technologie.

Stand Alstom FOCEEN

Que souhaitez-vous porter pendant votre mandat et comment ?

Le partenariat entre Alstom et Centrale a débuté en 2018 avec un premier alternant centralien qui nous a aidés à poser des brevets. C’est une “union” de longue date entre nos deux structures.

Pendant mon mandat, je souhaite renforcer les partenariats entre l'école et les entreprises, notamment dans les domaines de la cybersécurité et de l'intelligence artificielle. Mon expérience démontre l'importance de ces collaborations pour le développement de projets stratégiques.

Mon objectif est aussi de faire rayonner l'école à l'international, en améliorant son classement grâce, entre autres, à ces partenariats et projets collaboratifs.

Je veux être ambassadrice de l'École auprès des autres écoles du groupe Centrale et contribuer à définir les programmes de formation pour les ingénieurs de demain. Il est essentiel de préparer les étudiants aux besoins actuels et futurs de l'industrie, en apportant une vision actuelle de l'entreprise et des défis industriels majeurs.

Conclusion

À travers son parcours et ses convictions, Céline Feugier se mobilise pour soutenir Centrale Méditerranée, mais aussi pour que les futurs ingénieurs découvrent le monde de l’industrie et contribuent positivement à la protection de la biodiversité et au développement durable.

Son mandat à la présidence du Conseil d'Administration de Centrale Méditerranée, est marquée par une vision claire et ambitieuse, centrée sur l'innovation technologique et l’excellence académique.

Une présidence du Conseil d'Administration qui défend la vision d’une école ouverte, internationale, et en réseau.

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